Il semblerait que l’activité du train des primeurs soit actuellement en sursis. Déjà en 2017, les cheminots décidaient d’engager une mobilisation au long cours, afin de défendre le train. A l’époque, la direction de Fret-SNCF s’était montrée rassurante, affirmant que le train n’était pas en danger. Mais aujourd’hui, le discours est tout autre : « Nous, on ne demande qu’à continuer. On a les locomotives, les agents, les wagons neufs à louer. Mais on ne peut pas signer un contrat à perte ! », assure un responsable de Fret-SNCF dans le journal Le Parisien. La vétusté des 82 wagons qui parcourent la France depuis près d’un demi-siècle en est la cause. En louer des neufs coûterait trop cher aux transporteurs Roca et Rey, clients de la SNCF. Un nouveau contrat a pourtant été évoqué sans pour autant qu’un accord ait été trouvé. L’actuel, qui expire le 30 juin, pourrait bien être le dernier.
Bien plus qu’un simple train
Le train des primeurs, surnommé avec sympathie dans le passé : le « TGV primeur », est considéré aujourd’hui comme l’âme de Rungis. Toujours fidèle au poste, il fournit en fruits et légumes le marché de gros depuis ses débuts. Son authenticité que souligne une apparence quelque peu "vintage", témoigne du suivi de l’évolution du MIN dans le temps. « Avant quand le train arrivait, chacun déchargeait sa marchandise. Il y avait des concours de déchargement des wagons », raconte Antoine d’Agostino avec amusement, lorsqu’il évoque de lointains souvenirs.
La boucle Perpignan-Rungis-Montauban
Chaque année, ce sont plus de 400 000 tonnes de fruits et légumes qui sont acheminées de Perpignan vers Rungis. Chaque wagon en transporte entre 28 et 36 palettes. Le train effectue tous les jours la même boucle : « Le train des primeurs part de Perpignan, chargé en fruits et légumes frais, à 16h30 environ. Puis il arrive sur Rungis à 2h45. Là, la marchandise est dispatchée sur le MIN. Puis, aux alentours de 8h, il est rechargé en produits secs et repart à 20h45 direction Montauban pour arriver à 3h30, où il sera vidé. Puis, les wagons repartent vides à Perpignan, pour être rechargés en fruits et légumes frais, et effectuer de nouveau la même boucle », explique un professionnel rencontré sur le quai, à Rungis.
Des conséquences écologiques « inacceptables »
Outre le fait qu’une partie de l’histoire du MIN de Rungis se perdrait si le train venait à disparaître, les conséquences écologiques de cette décision, seraient « un affront à l’enjeu environnemental », selon Michel Leprêtre, président (PCF) du Territoire Grand-Orly Seine Bièvre. En effet, supprimer le train des primeurs, reviendrait à autoriser l’affluence sur les routes de plus de 25 000 camions supplémentaires par an. Une aberration lorsque l’on se réfère à l’urgence imminente de réduire nos émissions carbone. Christian Métairie, maire EELV d’Arcueil, qualifie la situation d’« inacceptable » affirmant que « moins de camions, c’est moins de pollution, moins de circulation, et donc une meilleure qualité de vie ».
Stéphane Layani : « Nous ne laisserons pas le train quitter Rungis »
Le PDG de la Semmaris (entreprise gestionnaire du MIN de Rungis), Stéphane Layani, a décidé de faire le premier pas. « Nous ne laisserons pas le train quitter Rungis », confie-t-il alors au journal « Le Parisien ». Il se dit prêt à « mettre la main à la poche » pour sauver la ligne. Ce qui est selon lui tout à fait possible, si « tout le monde fait un effort ». Il a ainsi annoncé investir 300 000 euros à destination des transporteurs, Roca et Rey. Une somme qui leur permettrait de louer les trains de la SNCF de façon « temporaire », pendant une ou deux années, jusqu’à temps de trouver une solution « moderne » de transports combinés, comme des conteneurs de camions posés sur les trains.
D’un point de vue purement économique, la non-utilisation de la gare routière du MIN de Rungis qui inquiète Stéphane Layani. Près de 21 millions d’euros avaient été investis dans sa modernisation en 2010. Or aujourd’hui, seulement un train circule, sans compter que les frais investis n’ont toujours pas été amortis.