Le 11 juillet, le Comité national de l’agriculture biologique (CNAB) statuera sur l’utilisation de serres chauffées en bio permettant la production de fruits et légumes en toute saison.
Au sein de l'instance décisionnelle, les avis divergent : mardi, le gouvernement s'est montré ouvert au chauffage des serres sous certaines conditions tandis qu’une centaine de parlementaires appelle Didier Guillaume, ministre de l’agriculture, à se prononcer contre une pratique qui, selon eux, contreviendrait à l’éthique du bio.
Selon Florent Guhl, directeur général de l'Agence bio, la décision du CNAB, qui devrait avoir lieu aujourd’hui, risquerait d’être repoussée faute de consensus. La Fédération nationale de l'agriculture bio (FNAB), les partisans et les adversaires des serres chauffées présents au sein de ce comité compteront un nombre de voix égal, si la décision est mise au vote. Ce qui pourrait faire pencher la balance, sont les voix de l’administration et celles du ministre. Or, celui-ci a déclaré mardi devant les sénateurs que le gouvernement n'était « pas opposé » au chauffage des serres en agriculture bio.
Didier Guillaume a présenté la ligne gouvernementale : « Nous ne sommes pas opposés au chauffage des serres, nous sommes contre la sur-transposition, mais nous sommes, et je suis, très opposé à la contre-saisonnalité des fruits et légumes ». En effet, le règlement européen prévoit que la production biologique se doit de respecter les « cycles naturels » des saisons et de faire une utilisation responsable de l’énergie.
Dans une tribune parue dans le journal Le Monde, une centaine de députés et sénateurs ont appelé à refuser l'utilisation de chauffage sous serres dans la filière bio en France. Parmi eux, on retrouve les députés Dominique Potier (PS), Sandrine Le Feur (LREM) et le sénateur Joël Labbé (RDSE). « C’est la transition agricole et énergétique de notre pays qui est en jeu. Doit-on, pour en assurer la croissance à court terme, banaliser l’agriculture bio à l’heure de l’urgence climatique ? », se demandent-ils. Selon eux, il s’agit d’un enjeu « capital pour défendre une agriculture bio éthique, attendue par nos concitoyens et précieuse pour la transition agro-écologique de notre pays ».
Par ces mots, ils espèrent influer sur la décision du ministre, ancien président de la Drôme, premier département bio de France, qui à titre personnel s’est dit opposé aux serres chauffées afin de « respecter les rythmes biologiques ».
Une industrie divisée
Du côté des acteurs de l'agriculture bio, des voix se sont élevées contre l’ « industrialisation » de la filière alors que d’autres mettent en avant la demande toujours plus grande des consommateurs et le fait que le règlement européen ne ferme pas explicitement la porte au chauffage des serres en agriculture biologique.
La FNSEA, les chambres d'agriculture et les coopératives déclarent que « 78 % des tomates bio présentent dans les circuits longs de distribution en France sont importées ». Ils estiment que le chauffage des serres bio est « un outil indispensable à la résilience des exploitations et à la réduction des produits phytosanitaires ».
La Fédération nationale des agriculteurs biologiques (FNAB), quant à elle, pointe du doigt le bilan carbone des serres chauffées. « Autoriser la vente de tomates bio dès le premier jour du printemps revient à autoriser de chauffer les serres bio pendant tout l'hiver à plus de 20 degrés, l'équivalent de 200.000 à 250.000 tonnes de fioul par hectare », a déclaré Jean-Paul Gabillard, producteur maraîcher et secrétaire national légumes à la FNAB.
La décision restera donc incertaine jusqu’à la dernière minute.
Source : terre-net.fr / capital.fr